Premiers dits du colibri
De la Terre de Feu aux terres boréales, toutes les Amériques vibrent de colibris qui, plus qu'oiseaux, sont abeilles, guêpes, frelons, beija flores, baise-fleurs, aspirateurs volants, suceurs de pistils. Ils «étincellent, m'a dit Chateaubriand, sur les jardins des Florides», essaiment sur les caps de l'espérance, les fleuves du désir, les garrigues, les brousses, les savanes, voyageurs champions du monde du sur-place, de-ci, de-là, du haut en bas, de droite à gauche, et à l'inverse. Le colibri se mue en poème, devient poème-oiseau dont il faut laisser à qui le lit le soin et le plaisir de découvrir pourquoi et comment ce vibrion mordoré, égorgé de bleu, s'est évadé de la tête d'un poète pour annuler les mers avec ses ailes frémissantes et disperser ses plumes d'absinthe lourdes de rêves et de mirages. On n'explique ni le colibri ni le poème. Ils sont là.
Frédéric Jacques Temple