Oeuvres philosophiques. Volume 1, Cours de philosophie; Suivi de La bienveillance dans les jugements
Auteur(s)
Jean Jaurès Editeur(s)
Vent Terral Thèmes
Philosophie contemporaine
Collection
Pensées, n° 3
ISBN
2-85927-083-3
978-2-85927-083-4
EANS
9782859270834
Date
Collation
557p. ; 16 x 24 cm ; épaisseur : 4 cm ; reliure : Broché
Pourquoi ne pas s'initier à la philosophie avec Jaurès pour
maître ? Que pensait-il de l'espace et du temps, de l'âme et du moi,
de la mémoire et de l'imagination, de l'infini et de la liberté, de Dieu
et de la Providence, de la morale et de l'esthétique ? Pourquoi ne
pas l'entendre sur toutes les grandes questions de l'existence ?
Clair et concis, ce cours complet, destiné à des débutants, est ici
accompagné de tous les éclaircissements nécessaires.
Parlementaire, tribun, artisan de l'unité socialiste, «apôtre»
de la paix, défenseur de la laïcité, internationaliste, «converti»
au socialisme par les mineurs de Carmaux ou par tel leader
marxiste, Jaurès ne serait que le produit d'une influence. Et s'il
s'était d'abord construit philosophiquement lui-même ?
Alors que l'on n'a trop souvent laissé filtrer de lui qu'une
parole politique instrumentalisée ou édulcorée, comment
mieux savoir que dans ce texte inédit, ce qui, avant de devenir
à 26 ans le plus jeune député de France, faisait déjà le fond de
sa pensée ? Critiquant radicalement Kant, négligeant Hegel et
l'idéalisme allemand, ignorant Marx, il se réclame du réalisme
d'Aristote, pratique Leibniz, célèbre la pensée grecque et
alexandrine et voue sa métaphysique et sa morale à un christianisme
évangélique et franciscain. En deçà et au-delà du
politique anticlérical, il y a le philosophe et l'esprit religieux.
De quoi initier une relecture de son oeuvre et son action.
«La science ne peut prétendre à expliquer
l'essence même des choses, puisqu'elle en suppose
dès le début le fond et les formes essentielles.
Elle ressemble à une société financière
qui, avant d'enrichir ses souscripteurs, est
obligée de remplir sa caisse avec leur argent.
Elle prétend distribuer à l'esprit humain le
plus haut dividende possible de vente et elle
commence par lui emprunter ses notions fondamentales
qui sont sa meilleure richesse. De
plus, même si on lui accorde ce point de départ,
la science ne peut tout expliquer. Il est vrai
que partout il y a de la matière. La matière
a quelque chose d'éternel et d'essentiel, puisqu'il
n'est pas une seule de ses parcelles qui ne
se crée ou ne se perde. Il est vrai aussi que le
mouvement est partout présent, que rien n'est
sans mouvement, et aussi qu'à travers toutes
les transformations la quantité de mouvement
est constante dans l'univers. Mais il reste vrai
qu'avec la matière brute et le mouvement on ne
peut expliquer le plus petit fait de la conscience
animale ou humaine, la moindre sensation de
couleur ou de son, le moindre sentiment de
douleur ou de plaisir, car on ne s'explique une
chose que par une autre qui ait avec la première
quelque rapport. Or, entre un mouvement du
nerf acoustique et un son, entre une vibration
du nerf optique et la couleur bleue, entre un
déchirement de tissu et une sensation de douleur
aiguë, il n'y a aucun rapport intelligible.
Donc, en somme, non seulement la science ne
peut fournir elle même les bases de l'univers,
mais sur ces bases une fois accordées elle ne
peut toute seule bâtir et orner l'édifice entier.
Il y a aux fenêtres de l'étage supérieur des
lumières que le maçon n'a pas allumées.»
2e leçon, § II